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« Services publics : pour qui et pour quoi faire ? »

Débat public Rennes – UD CGT 35
« Services publics : pour qui et pour quoi faire ? »
Baptiste Talbot


Deux questions principales se posent quand il s'agit de réfléchir à la finalité des services publics

Pour quels besoins ?

La mise en œuvre des droits fondamentaux et constitutionnels. 

Pour sa part, dans ses repères revendicatifs, la CGT y intègre : les droits à l’éducation et à la formation, à la santé, à un emploi décent, à la justice et à la sécurité, au logement, aux transports, à l’énergie et à l’eau, à la culture, à l’information et à la communication[1] 
Liste évidemment évolutive
Par ailleurs, des besoins de service public, y compris en France, ne sont pas satisfaits : ainsi l'affaire du Médiator démontre que la place prépondérante de l'industrie pharmaceutique dans le circuit médicamenteux est néfaste en terme de santé publique
Premier enjeu essentiel : la définition des droits dont doivent découler les services publics est une question éminemment démocratique qui doit relever du choix des citoyens

Services publics = outil essentiel d'aménagement du territoire, notamment en zone rurale
84% des maires des petites villes jugent négativement la RGPP et 72% déclarent d'ailleurs avoir dû procéder à des embauches pour faire face à ses effets[2].

Services publics = aussi enjeu en terme de développement durable
Exemple du fret SNCF[3], mis à mal par la politique gouvernementale et celle de la direction de l'entreprise, qui conduit à des coupes sombres dans l'activité (400 points fret fermés en 2007 - entre 2002, date à laquelle il a été libéralisé, et 2011, la quantité de marchandises transportées par rail est passée de 56 milliards de tonnes/kilomètre à 20 milliards de tonnes/kilomètre[4]) au bénéfice du patronat routier et au détriment des enjeux de réduction de la pollution.


Avec quels outils ?

A partir de la définition des besoins de service public, se pose la question de l'outil dont se dote la collectivité pour répondre aux dits besoins.
Cette définition doit relever à son tour d’un choix citoyen.
Enjeu de la maîtrise publique : la collectivité doit-elle se doter d'outils lui permettant d'assumer directement la production des services publics ?
Choix historique en France de services publics forts pour répondre aux besoins fondamentaux, d'où un secteur public fort (Fonction publique, grandes entreprises publiques) occupant part importante dans la société, l'emploi (environ 25%) et l'économie

-       Résultat d'un long processus (luttes, étapes politiques, …) qui correspond à la construction de la République
-       Garanties statutaires conçues comme un outil au service des usagers assurant un service public égalitaire préservé des pressions partisanes
-       Facteur important de stabilité et de cohésion économiques et sociales, reconnu par tous par exemple durant la crise
-       Facteur aussi de développement économique : les dépenses des collectivités territoriales représentent à elles seules 11,3% du PIB [206,3 milliards d’euros en 2008], soit près de 75% de l'investissement public civil en France et un impact considérable pour le tissu économique en territoire ; sur son site Internet, l'Agence française pour les investissements internationaux note : « La France est réputée pour sa qualité de vie, la richesse et la variété de ses territoires et de sa culture, l’excellence de ses systèmes de santé et d’éducation, qui contribuent à en faire une des premières destinations de l’investissement international. »

Choix très critiqué bien que continuant de faire l'objet d'un large consensus
Critiqué par la droite et le patronat notamment à partir de comparaisons internationales


Ces exemples internationaux sont souvent cités de manière univoque pour ancrer dans les esprits le triptyque secteur public fort = dépenses publiques considérables = inefficacité économique    

1ère remarque : la gestion par le marché, avec une logique financière, a une incidence néfaste sur la qualité du service public, sa tarification
En GB, la libéralisation des chemins de fer a accru fortement le nombre d'accidents[5] 
Au Japon, l'entreprise Tepco est fortement soupçonnée d'avoir tardé à prendre les mesures nécessaires concernant la centrale de Fukushima, à savoir noyer le réacteur, en raison des incidences financières de l'opération.
En France, l'ouverture des télécommunications au marché a conduit à une forte hausse du coût pour les usagers.
Le prix de l'eau en France est supérieur quand la distribution de l'eau n'est pas assumée en régie directe par la collectivité.
Libéralisation de l’électricité aux Etats-Unis qui se traduit par des « pannes géantes ».

2ème remarque : gestion par le marché n'est pas synonyme d'efficacité économique
Aux Etats-Unis, la part des dépenses de santé dans le PIB est de 16% (11,2% en France), avec des résultats moindres en gains d'espérance de vie et en couverture médicale[6].
La part du financement des services publics dans le PIB est supérieur de près de 6 points en Grande-Bretagne par rapport à la France

3ème remarque : combattre l'idée de la « mauvaise graisse »
Absurdité du raisonnement de Sarkozy sur niveau d'administration de 1990 car forte augmentation de la population
La GB est revenue sur les coupes sombres opérées par Thatcher dans l'emploi public car les besoins n'ont pas disparus avec Thatcher.

Conclusion

Services publics = enjeu considérable à tout point de vue
Bataille à mener pour en finir avec les idées reçues
Avant d'être une question de coût, le service public est un enjeu démocratique. Il revient aux citoyens  de définir ce que doivent être leur service public. Besoin pour cela d'un approfondissement démocratique permettant de développer le contrôle citoyen sur les services publics et leur devenir 
Au-delà des échéances électorales, besoin d’instances démocratiques de contrôle, d’évaluation et de propositions associant usagers et personnels sur le devenir des services publics
Services publics enjeu aussi de citoyenneté européenne : construction actuelle de l’Europe défavorable aux services publics mais pas de fatalité comme l’illustre le montée de cette question dans le débat public, y compris au niveau continental (référendum italien sur maîtrise publique de l’eau).
Ne pas surestimer par ailleurs le « carcan du droit européen » : les tenants actuels de la libéralisation des TER prennent prétexte des textes européens qui contraindraient les Etats à aller dans ce sens, alors même qu’ils peuvent faire le choix de ne pas ouvrir les transports de proximité à la concurrence[7].